23 septembre 2006

Pas facile d'être Premier Ministre et d'aimer l'art contemporain ...

Cohue générale, crépitement de flashs d'appareils photographiques, micros flottants dans les airs, une espèce de marée humaine bruyante se déplace à la façon d'un essaim d'abeilles dans les couloirs du Martin Gropius Bau, à deux pas de la Potsdamer Platz, en plein Berlin. Des cris, des soupirs, des râles en franco-allemand et surtout des bruits de pas, plus ou moins violents, ponctuent les déplacements harsardeux de cet amas humain.

De l'extérieur de ce bloc aux contours mouvants, difficile de dire ce qu'il se passe ... hyperactivité sans nul doute... mais pourquoi donc ???

L'observateur un minimum informé saura qu'en ce 22 septembre 2006, au Martin Gropius Bau, on inaugure une nouvelle exposition, "Peintures / Malerei", évènement phare de l'initiative "Art France Berlin", qui, pendant 3 mois, relève le pari difficile de mieux faire connaître l'art contemporain français (de 1972 à nos jours) au public allemand. 150 artistes français, ou installés en France, des peintres, des photographes, des musiciens, des danseurs, des saltimbanques en tous genres envahissent la scène allemande.

Et en cette veille de première journée d'offensive culturelle, Dominique de Villepin, fan d'art contemporain, a profité d'un "voyage professionnel" dans un forum berlinois, pour faire un petit détour à la soirée d'ouverture. Centre de toutes les attentions médiatiques, pas le temps pour le Premier Ministre d'admirer les oeuvres d'art : priorité aux sourires forcés, mais travaillés, pour donner un aspect "naturel", sur les photos ou les films, on tourne son profil à gauche ou à droite, glisse une remarque sur un artiste "ah, un Soulages!", l'exposition est expédiée au pas de charge.

(c) VG Bild-Kunst Bonn 2006

Le discours du vernissage, ensuite, révèle une autre image de l'homme. Comme un de ses proches, sans doute, confiait à son voisin, dans la cohue générale, "il aime faire ça, une initiative pareille, il apprécie vraiment l'art". Après un début de discours relativement "académique", place à l'envolée lyrique. Les notes, sur le pupitre, sont vite oubliées, l'homme dévoile sa passion pour l'art, ses sentiments, ses impressions ou encore son attirance pour Goya. On sort du discours traditionnel, la salle applaudit.

Reste un sentiment bizarre, presque amer ... comment un amateur d'art peut-il supporter de visiter une exposition à un rythme pareil, dans un brouaha aussi gênant ? M'en viendrait presque l'envie de le plaindre ...

22 septembre 2006

Des nouvelles de Wowi ...

Alors pour tous ceux qui se demandaient ce qu'il s'était passé lors des élections municipales/de l'assemblée du land à Berlin :


source : Spiegel on line

Wowereit sort donc victorieux, recul important en revanche pour Die Linke, progression des Verts. La question de l'alliance est donc plus que jamais à l'ordre du jour ... La version rot-rot-grün (SPD + die Linke + les Verts) est définitivement rejetée par la SPD, car bien évidemment, à trois partis, il est encore plus difficile de se mettre d'accord qu'à deux ...

Débat très "spannend" en Allemagne, mais l'opinion publique se pose également d'autres questions, à l'instar du tabloïd conservateur Bild, qui voit déjà Wowereit tout en haut de l'affiche, en posant, cette semaine, à la une, juste au dessus d'une photo d'une femme dénudée "Wird Wowi der 1. schwule Kanzler?" (Wowi sera-t-il le premier chancelier homo ?). Et sur le site du quotidien, on peut meme voter, pour répondre à la question "l'Allemagne est-elle prete pour un chancelier gay?", après mon vote, les résultats étaient mitigés ... 51% pensent que oui, 49% non. Mal sehen, on verra...



photo publiée dans Die Zeit, Wowereit et son ami

Et même les journaux "sérieux", s'y mettent. La Zeit par exemple, explique "la logique de la spéculation politique est terrible simple. A peine un politicien gagne les élections au Landtag, que les médias et les amis de son parti lui promettent des devoirs politiques plus haut." Et bien évidemment, dans le cas d'un politicien homosexuel, on dépasse le débat purement politique, et on s'attache à la sphère privée...

En Autriche, la Wiener Zeitung fait dans le délicat ... avec un titre clair "Berlin reste rouge et homo" ...

17 septembre 2006


Wowereit - Delanoë : deux maires de gauche (SPD/PS), deux maires de capitales européennes (Berlin/Paris), deux maires à hautes cotes de popularité, deux maires de gauche dans des pays à gouvernements plutot orientés à droite, et deux hommes politiques qui ont rendu publique leur homosexualité. L'un a accueilli triomphalement la WM (Weltmeisterschafft, coupe du monde), l'autre a raté les J.O. ... mais les deux se retrouvent lorsqu'il s'agit d'ouvrir des plages sur les bords de leurs rivières (la Spree et la Seine).

Aujourd'hui, dimanche 17 septembre, Klaus Wowereit est sur le point d'être réélu ... du moins si les électeurs suivent les sondages !! petit portrait...



Klaus Wowereit, premier magistrat berlinois dispose d'un atout considérable : la convivialité. Il va au devant de ses concitoyens, parle avec eux. Et cela semble marcher : même certains électeurs refusant la SPD, soutiennent pourtant Wowi ! C'est l'aspect humain qui prime, et ça, Wowereit l'a bien compris.

Fêtard, ce n'est pourtant pas la qualité première que l'on recherche chez un maire. Mais à Berlin, sans doute si, puisque Klaus Wowereit est désormais célèbre pour ses nuits blanches et ses soirées arrosées. Il est par exemple apparu à l'opinion publique en train de boire du Sekt (Ersatz de Champagne) dans une chaussure à talon ... ou en train d'embrasser de célèbres femmes allemandes (en affirmant "je ne me laisserai pas interdire d'embrasser !", après avoir fait la une des tabloïds). On raconte même qu'il aurait parfois annulé certains rendez-vous trop matinaux, par rapport à ses heures de coucher ! (et un petit "Kater", qui sait?)

Sa réélection semble néanmoins assurée. Premier homme politique allemand à faire, en 2001, son coming out, il n'hésite pas à s'afficher publiquement avec son compagnon, ou participe activement au Christopher Street Day de Berlin. Lors de sa première élection, il y a 5 ans, il avait affirmé, un brin provocateur, " Je n’ai jamais mené de politique homosexuelle, mais je fais de la politique en tant qu’homosexuel ". L'été dernier, nouvelle polémique : le maire signe le mot d'accueil d'un salon SM et fétichiste, réaction évidement de la part de la tradionnaliste CDU, pour l'un de ses représentants, "Wowereit n'est pas tolérant, il est décadant".

Mais dans une ville aux dettes records - en grande partie dues à l'histoire - et en perpétuel changement, Wowereit a surtout voulu insufler des modifications dans les mentalités : fini l'assistanat et les recherches de subventions. Aux Berlinois d'aimer leur ville, de montrer combien elle est belle et d'exploiter ce potentiel énorme.

Une nouvelle gare (la plus grande d'Europe, en verre), bientôt un nouvel aéroport international : entrepreneur et bâtisseur, Wowi pense avant tout à l'avenir de sa ville et à son ouverture. La coupe du monde de football a représenté un atout pour lui : il a su se mettre en avant et affirmer la fierté d'être Berlinois et Allemand. Une influence de la WM même durant la campagne, avec un "Wowi-Bär", revêtu d'une tenue de footballeur allemand !

Si la réélection de Klaus Wowereit semble assurée, l'inconnu demeure sur l'alliance qu'il va conclure pour obtenir son poste. Pas de "Grosse Koalition", à l'image de l'actuel gouvernement fédéral (CDU-CSU/SPD). Wowereit considère en effet que la CDU ne propose pas une bonne politique berlinoise.

Restent donc deux solutions :
- Rot-Grüne : c'est à dire avec les Verts allemands - plus puissants et organisés que leurs homologues français.
- Rot-Rot : avec le nouveau parti de gauche allemand, Die Linke, qui se veut défendre une "vraie gauche", en comparaison à la SPD, sociale-démocrate. Mais cette solution n'emballe guère les Allemands.

Réponse dans les jours qui viennent !

plus d'infos sur Wowi : www.klaus-wowereit.de

16 septembre 2006

Berlin à vélo

Cela semble sortir tout droit d'un cliché ... mais pourtant ... c'est vrai : les rues des villes (et des campagnes) allemandes sont littéralement envahies par les vélos.
Rapide et écolo, le 2 roues à pédales est roi. Il a quasiment la priorité sur tout ... en particulier sur les piétons. Et - surtout les étrangers - ces derniers se laissent régulièrement surprendre, voire même secouer, par un bolide, sonnant généralement de façon hargneuse, pour faire libérer la voie.
Les pistes cyclables relient les quatre coins de la capitale. Parfois, elles sont simplement matérialisées par des marquages au sol à même le trottoir ... Les cyclistes disposent également de leurs propres passages pour traverser les rues, avec feu de signalisation à part.
Plus de 1 000 km de pistes cyclables, contre 224 km à Paris (en 2002), certes, la capitale allemande est plus étendue que la française ... mais Berlin fait tout pour mettre le vélo, dans le coeur des berlinois... Et ça marche ! Puisque même les journalistes de la télévision française prennent l'habitude d'aller faire leurs reportages ... sur leurs 2 roues !

11 septembre 2006

Les signes qui ne trompent pas ...

... eh oui, je suis bien de retour en Allemagne !

- Les gens attendent patiemment que le petit bonhomme passe au vert pour traverser, et ce, MEME si il n'y a pas une seule voiture à l'horizon... je crois que je connais qu'un seul français qui fait ça ! Mais il a vécu à Berlin, alors ça compte pas ;);) :-P.

- La discipline est de rigueur dans le métro : une voix nous dit de monter, puis de reculer, avant qu'une musique "douce" signale la fermeture des portes ... rien à voir avec l'espèce de grincement et la cohue parisiennes ! Et presque toujours une place assise !
- Les poubelles se déplacent toujours par 4 ... la verte pour le vert, la jaune pour le papier, la bleue pour les emballages, et la rouge, la Restmüll, pour le reste. C'est sur, sur les quais des gares, faut de la place !!

- Les restaurants ne sont pas prets à midi, repassez bitte schön ... on mange le repas de midi à 14h

- les snacks et boulangerie "français" avec des drapeaux bleu blanc rouge ont la cote.

- les rues sont propres et vertes

- ça sent la Currywurst et le Döner à tous les coins de rue : les Imbiss pullulent ... mais pour les cafés, c'est plus compliqué !

- je recommence à mettre des tournures de phrase et des expressions typisch deutsch dans mon français.

- On mange bio, on est Umweltfreundlich.

- pas besoin d'avoir un porte monnaie bien fourni pour aller manger une généreuse part de gâteau (généralement écoeurant à souhait, avec de la Schlagsahne, des fruits et du chocolat) assortie d'une belle tasse de thé (ou de chocolat) ... les salons de thé régalent mes papilles...

- mon accent est süss au lieu d'être furchtbar pour les profs d'allemand en France ;-)

- les magasins ferment à 6h ... et rien n'est ouvert le dimanche !
(faux, entre temps j'ai découvert LA perle rare, ouverte jusqu'à 22h, meme le dimanche !!!) Mais pendant le mondial, les horaires d'ouverture étaient plus extensibles et à en croire la presse allemande (Focus en particuliers) les chiffres d'affaires des commerçants ont été excellents, on parle de renouveler l'expérience avant Noël voire même de dérégulariser les horaires de fermeture. Sous réserve de l'avis des Gewerkschaften (syndicats) très puissants dans les négociations en Allemagne.

- on peut retrouver (enfin) Schlecker, Aldi, Buttler's, et bien d'autres encore ;-) chez moi, ce n'est pas l'Ostalgie, mais la Konstanz-talgie... manque plus que le Bodensee et quelques personnes particulières ...

- encore pleins d'autres raisons... à venir au fur et à mesure ;) mais oui, je suis bien de retour en Allemagne, ça, y'a pas de doute ;-).

03 septembre 2006

Ostalgie et musée

A la mi-juillet, le paysage déjà bien vaste des musées berlinois a accueilli son petit dernier, le DDR-Museum.

Loin des musées académiques où l'on observe les oeuvres de loin, le DDR-Museum (musée de la RDA) se veut interactif : on touche, on fait bouger, on manipule, on teste ... Voilà pour la méthode, quant au contenu, il s'agit d'un bond dans le passé, d'un retour à avant 1989, avant la chute du mur, du côté de Berlin est.

On rentre dans le musée par une porte située face à la Spree (rivière berlinoise), et on descend dans un décor assez sombre, fait de murs représentant des sortes de tours d'immeubles, façon ex-RDA. Sur ces murs, des décors, des panneaux, mais surtout des objets accrochés directement, ou que l'on découvre dans un tiroir ou dans un placard. Classés par thématiques, ce sont des ustensiles en tous genres qui ont marqué la vie des Allemands de l'est. De la Trabant, la célèbre voiture, aux boites de conserve, musiques (comme celle diffusée en fond sonore de ce blog, du célèbre groupe est-allemand les Puhdys) ou encore vêtements. On touche les étoffes, on peut aussi monter dans la Trabant ou encore écouter les radios d'époque : pas de doute, la machine à remonter le temps vient d'être réinventée !!!



vidéo de publicité pour la Trabant - source : www.ac-creteil.fr

Pour la touriste française, agée d'une poignée d'années lors de la chute du mur, c'est amusant, on sourit, on s'insurge, on découvre, d'un regard plutôt extérieur. Mais à côté, certains s'émerveillent : "oh, regarde ! j'avais le même !". Alors qu'une jeune femme regarde, émue, se souvient de ces objets, brosse à cheveux, nécessaire d'écolier, dont elle disposait avant la chute du mur, sa mère se retourne, étonnée : "mais tu as connu ça toi ?".

C'est l'Ostalgie qui frappe de plein fouet une partie de la société est-allemande. Une sorte de nostalgie de l'est, de quand l'Allemagne était divisée, de quand il y avait le plein emploi, avant le libéralisme économique. On est "ostalgique" des bons moments, les plus mauvais sont effacés des mémoires. Cette pensée s'est développée durant ces dernières années en Allemagne. On la retrouve par exemple au cinéma, dans Good bye Lenin ! du réalisateur Wolfgang Becker, mais aussi dans la vie quotidienne allemande : des Partys sont organisées sur le thème Ostalgie, on vient avec les habits d'époque et on danse sur les musiques phares d'avant la chute ... Et puis l'Est a bien rejoint la société de consommation ... puisque maintenant, sur internet, on peut acheter pleins d'objets "d'époque" pour revivre comme avant !

En savoir plus :
Sites vendant des articles est-allemands :
www.osthits.de, http://ostalgie-museum.de
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